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Charlotte Martial, neuropsychologue au Coma Science Group - ULiege

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Charlotte Martial, neuropsychologue au Coma Science Group - ULiege

Tendances Première, version estivale Tous les jours de la semaine, l'équipe propose de réinviter des témoins ou spécialistes venus dans l'émission, pour comprendre leur parcours et les interroger sur les grandes thématiques et courants qui traversent notre société. Invitée : Charlotte Martial, neuropsychologue au Coma Science Group - ULiege Qu’est-ce que la conscience, être conscient ou inconscient ? Que sait-on aujourd’hui des expériences de mort imminente et pourquoi l’étudier ? Autant de questions passionnantes que nous poserons à Charlotte Martial, Neuropsychologue, qui depuis des années, étudie ce phénomène qui suscite pas mal d’in...

Transcription

7841 Words, 46316 Characters

Bonjour à toutes et à tous, qu'est-ce que la conscience ? Être conscient ou inconscient ? Que sait-on aujourd'hui des expériences de mort imminente, de trans, de chamanisme et surtout pourquoi étudier ce phénomène autant de questions passionnantes que nous poserons à Charlotte Martial, neuroscientifique, neuropsychologue plus exactement, qui depuis des années étudie ce phénomène qui suscite pas mal d'interrogations, de clichés voire même de peurs. On va donc parler d'état de conscience modifié, on va parler de neuro-imagerie fonctionnelle et on va surtout tenter de comprendre ce phénomène et voir où on en est aujourd'hui. Bonjour Charlotte Martial. Bonjour. Très très heureux de vous accueillir aujourd'hui, neuropsychologue, qu'est-ce que c'est que ça ? C'est une bonne question ! J'ai étudié la psychologie et je me suis spécialisée en neuropsychologie et en neurosciences, donc c'est vraiment s'intéresser aux comportements qui sont liés à l'activité cérébrale notamment. On va parler de tout ça aujourd'hui grâce à Laurent Nélissen et Sandra Veras, mais oui c'est le retour de Sandra Veras, toute l'équipe de Tendance Première qui est en grande forme jusqu'à 11h. Tendance Première, Cédric Routier. Charlotte Martial, vous êtes arrivée depuis Liège, vous travaillez au sein de l'université de Liège, dans le Coma Science Group, on va donc parler de ce qui pose pas mal de questions aujourd'hui quand on parle de mort, quand on parle de mort imminente, quand on parle aussi d'état de conscience modifié, de chamanisme etc. Toute une série de phénomènes qui parfois font peur et pourtant vous les étudiez très sérieusement et ce depuis quelques années, on va revenir, puisque c'est le principe de cette émission, d'abord sur votre parcours et sur votre jeunesse. Charlotte Martial, quel regard est-ce que vous portez sur votre jeunesse, les premières années de votre vie ? Je dirais que globalement j'ai eu une jeunesse très heureuse, très heureuse, j'ai pu réaliser plein d'activités, j'ai souvent, merci à mes parents, été libre de faire mes propres choix, de choisir les activités extra-scolaires que je pouvais faire etc. Et je pense que c'est vraiment quand j'ai commencé l'université, on y reviendra j'imagine, que c'est là où j'ai vraiment découvert ma passion pour les neurosciences etc. On va essayer de comprendre justement ce qui pousse quelqu'un à 18-19 ans à se dire je vais plutôt prendre telle branche à l'université et puis s'intéresser comme ça aux neurosciences. Surtout quand on voit la photo qu'on va découvrir dans quelques instants, une photo de vous toute petite, vous êtes sur scène, on va dire avec des habits de fête d'école, c'est un peu ça, c'est la danse de la fête d'école à mon avis. C'est ça, déguisée en schtroumpf. Oui. Et j'ai choisi cette photo en fait parce que justement il n'y a pas si longtemps, je réalisais à quel point, j'ai fait beaucoup de danse et j'aimais bien être sur scène et j'ai commencé toute petite, j'ai fait plusieurs heures de danse par semaine jusqu'à l'université en fait, jusqu'à 18-19 ans et je pense que, enfin je réalisais justement il n'y a pas longtemps que c'est vraiment la danse qui m'a permis d'acquérir je pense cette rigueur et cette exigence que je peux parfois avoir envers moi, alors je ne suis pas exigence pour tout, loin de là, mais je pense que la danse est vraiment un beau sport qui m'a appris beaucoup en fait et qui m'a façonné tout le long de ma petite enfant jusqu'à l'adolescence d'un adulte. Et donc voilà, c'est pour ça que je choisis cette photo. Elle est très très belle. On va l'encatrer parce qu'elle fait partie quand même du top 3 de la saison. Vous Charlotte Martial sur scène en schtroumpf fête, enfin en schtroumpf ou schtroumpf fête, on ne sait pas très bien et finalement ça n'a pas beaucoup d'importance. On va parler d'école dans quelques instants, on va parler de votre formation aussi et ce qui vous a amené à devenir aujourd'hui neuroscientifique. Merci d'être là jusqu'à 11h. Et aujourd'hui, c'est la neuropsychologue neuroscientifique qui nous a rejoint, Charlotte Martial. Vous travaillez au sein du Coma Science Group. On va revenir évidemment sur ce groupe et ce centre de recherche et sur vos études qui sont très très étonnantes, mais revenons d'abord encore un tout petit peu sur la jeunesse. L'école, ça s'est bien passé alors vous ? Oui, je dirais que oui. J'avais des amis, je veux dire, ça se passait plus ou moins bien à l'école. J'aimais bien apprendre, découvrir et puis j'ai fait plein d'activités extrasolaires. J'étais bien occupée, c'est passé vite. Votre famille était une famille de scientifiques ou pas spécialement ? Alors pas du tout, pas du tout. Et d'ailleurs, mes parents étaient même étonnés quand j'ai suggéré d'aller à l'université parce qu'eux n'ont pas fait l'université. Mon papa est ouvrier et ma maman institutrice matérielle. Ma maman passionnée par son travail, mais a priori pas du tout tournée vers la science. Alors du coup, la photo que vous nous avez envoyé, la photo à déclic, ce sont les bâtiments de l'université de Liège, la faculté de psychologie à l'université de Liège que l'on découvre. C'est le bâtiment typique d'une certaine époque, on va dire au niveau de l'architecture. Ça, c'est vraiment le déclic. Qu'est ce qui fait qu'à 18 ans, à un moment, en sortant de réto, vous dites je vais aller là, je vais aller à Liège et je vais m'intéresser à la psychologie. Oui, c'est un peu particulier parce que je me sentais attirée vers la psychologie sans avoir eu en secondaire, comme la plupart d'entre nous dans une filière générale. Je n'avais pas eu des cours spécifiques tournés vers la psychologie, mais par contre, au cours de français, au cours de philo, etc. Quand on parlait de psycho, etc., je voyais bien que ça m'attirait. Et puis, à côté de ça, il faut dire aussi qu'à priori, j'aimais bien les maths et donc j'aimais bien les maths et la psycho. Au début, j'ai été observer quelques cours dans la faculté des mathématiques à l'université. Puis là, je me suis dit ah non, c'est trop, trop carré pour moi. Je ne sais pas, trop, trop, trop spécifique comme ça. Et puis, je me suis dit mais en fait, c'est vraiment la psycho qui m'attire. Je vais aller assister à quelques cours et là, ça a été vraiment un déclic. Et en fait, dès le début, j'ai été attirée par ces cours sur la psychologie expérimentale, dès qu'on parlait de neurosciences, etc. Et c'était assez marrant parce que de plus en plus, ma passion commençait à se préciser, je dirais. Et à côté de ça, j'avais à l'extérieur et même les profs de la fac de psycho qui me disaient si tu choisis d'aller vers les neurosciences, il y a très peu de débouchés. Faire un doctorat, c'est compliqué. Il faut obtenir une bourse et même après le doctorat, rester dans le milieu académique, c'est vraiment compliqué. Donc, entre guillemets, de tous les côtés, on ne m'encourageait pas, si pas l'inverse, à continuer dans ce sens là. Et puis, finalement, je suis contente de m'être écoutée et d'avoir persévéré et d'avoir choisi à chaque fois des cours de neurosciences, neuropsychologie, etc. Qu'est ce qui fait qu'à un moment, c'est vraiment les états de conscience modifiés, la mort imminente qui va vous intéresser ? En fait, en sortant de mon master, ce n'est pas cette thématique là spécifiquement que j'avais choisi. Par contre, j'avais regardé les grosses équipes de recherche à Liège en neurosciences et j'étais tombée justement sur le Coma Science Group et j'ai eu la chance de rencontrer le professeur Stephen Lorais, qui a donc fondé le Coma Science Group à l'époque. Et en fait, j'étais intéressée par la conscience, oui, mais sans savoir spécifiquement ce que je voulais faire. Et en fait, à l'époque, il m'a proposé deux thématiques. Une qui ne m'intéressait pas spécifiquement. Et puis, il m'a proposé cette thématique, les expériences de mort imminente. Et en fait, je ne savais pas bien ce que c'était, ce phénomène là. Mais je savais, il m'avait dit qu'il y avait tout à faire, entre guillemets, parce qu'en fait, on connaît très peu d'un point de vue scientifique. Il y a très peu d'études qui sont réalisées sur la thématique. Et donc, c'est là où je me suis dit OK, je vais aller là dedans. C'est tout nouveau pour moi. Mais dès que j'ai commencé, par contre, ça a été une véritable passion. C'est vrai que les équipes du professeur Lorreis et puis le Coma Science Group ont été précurseurs. C'est vrai que Liège s'est justement penchée sur les questions à une époque où, quand on parlait de chamanisme, de coma, d'état de conscience modifié, etc. Ça faisait sourire beaucoup de gens en se disant mais c'est n'importe quoi. Ça, c'est pas scientifique. Aujourd'hui, quand on vous tient, ce genre de discours, qu'est-ce que vous dites ? Je trouve que je l'entends de moins en moins quand même. Et ça me fait sourire, évidemment, parce qu'en fait, ce sont des thématiques qui, a priori, en tout cas du point de vue du grand public, les gens se disent que c'est compliqué ou même impossible de les approcher avec la méthode scientifique. Or, nous, c'est ce qu'on fait et c'est possible. Mais c'est particulier parce qu'on est dans une société qui a mis un peu de côté, entre guillemets, ces états de conscience modifiés comme la trans. L'hypnose, depuis 30 ans, c'est de plus en plus courant. Notamment, ça s'attaque de plus en plus dans nos hôpitaux, etc. dans la pratique clinique. Mais il n'y a rien à faire. On a cette habitude d'être en conscience normale, entre guillemets, et de mettre de côté tous ces états de conscience modifiés que l'être humain peut, à un moment donné, vivre dans la vie de tous les jours. À l'inverse de d'autres parties du monde, d'autres continents ou d'autres sociétés qui vont être beaucoup plus là-dedans et vont beaucoup plus utiliser ces états de conscience modifiés dans leur vie de tous les jours. Pourquoi ? Pourquoi est-ce qu'ils utilisent plutôt ces états de conscience modifiés dans la vie de tous les jours ? Parce qu'en fait, ça a évidemment des bienfaits. Et c'est vraiment un bel outil, je dirais. Un bel outil, c'est ce qu'on est en train de montrer en science, aussi en parallèle, entre guillemets. C'est qu'on est en train de montrer de plus en plus que ces différents outils peuvent être vraiment importants, intéressants d'un point de vue de la santé publique, mais aussi également du point que ça peut vraiment aider au bien-être des gens, etc. Bon, là, je pense directement à la transe ou à l'hypnose, à la méditation. Mais donc, voilà, ce sont des états que l'être humain peut atteindre à tout moment. Et je pense que ce serait vraiment bien, ce serait chouette de notre société occidentale. On se rappelle qu'en fait, on peut les utiliser peut-être pour, notamment, réduire, par exemple, des médications, etc. dans certains contextes. Et donc, voilà, je pense que le but vraiment de nos recherches, c'est vraiment de montrer qu'on peut l'intégrer dans notre vie tous les jours et que ça peut être vraiment intéressant à différents niveaux. On va essayer d'être très clair dans cette émission. C'est quoi un état de conscience modifié, Charlotte Martial ? Alors, en fait, un état de conscience modifié, je dirais que c'est quand, si je dois simplifier, je dirais que c'est quand on a une dissociation entre notre réveil et notre conscience. Donc, quand on est éveillé, conscient de nous-mêmes et de l'environnement, on est donc éveillé, l'éveil est au maximum, on est conscient de soi-même et de l'environnement. Tout est, entre guillemets, à son maximum. À l'inverse, quand on est endormi, on n'est pas éveillé, donc on est endormi. On n'a pas de conscience de nous-mêmes ni de l'environnement. Ici, je parle du sommeil sans rêve, spécifiquement. Mais entre ces deux états, l'état de conscience normale éveillé et l'état de sommeil, on peut imaginer un fil rouge où plus on va être réveillé, plus on va être conscient de nous-mêmes et de l'environnement. Mais en fait, dès qu'une de ces dimensions, l'éveil ou la conscience de soi et de l'environnement, est dissociée des autres dimensions, des autres composantes, on va se retrouver dans des états de conscience modifiés. C'est l'exemple typique quand on roule depuis longtemps sur l'autoroute et qu'on se rend compte, tiens, je pensais à autre chose, je n'ai plus vraiment fait attention à la route, c'est ça ? Ça peut être ça, en effet. C'est un type de dissociation où, en effet, là, on était réveillé, conscient de l'environnement et de soi-même. Et à un moment donné, on est parti dans notre tête, entre guillemets, on pensait à tout et à rien. Et puis, du coup, ça a fait qu'on était moins conscient de l'environnement, en effet. Donc, on était moins conscient de l'environnement, sauf qu'à un moment donné, on est arrivé à notre point X et on s'est rendu compte qu'en fait, on a quand même conduit, en effet, puisqu'on est arrivé au point qu'on souhaitait. Néanmoins, on n'a pas eu conscience tout le long de l'environnement. Un autre exemple, pour expliquer simplement, c'est les rêves. On est endormi, mais par contre, là, on a une conscience interne plus importante que dans le reste du sommeil. Vous me voyez venir, évidemment. C'est quoi un rêve aujourd'hui ? Qu'est-ce qu'on sait des rêves ? Alors, les rêves, c'est un épisode de conscience déconnectée, c'est-à-dire déconnectée de l'environnement, où là, il va y avoir vraiment tout un monde interne auquel on a accès. Donc, on le définit vraiment comme un épisode de conscience, mais qui survient dans un état où on n'est pas éveillé. Et donc, il y a une activité, notamment cérébrale, qui est bien spécifique et qui, si vous voulez, ressemble plus à notre éveil normal que dans le reste du sommeil où on n'est pas en train de rêver. C'est pour ça qu'on a des images pendant nos rêves. C'est ça. On peut avoir des images, ça dépend un peu, mais ça peut être plutôt sous forme de sensation. Mais c'est souvent, en effet, des images plus visuelles. La mort imminente, comme ça, on aura bien balisé un petit peu notre débat du jour. C'est quoi ce phénomène de mort imminente ? Qu'est-ce qu'on en sait aujourd'hui et comment le définir ? Alors, c'est un épisode de conscience, mais ici, qui survient quand on est proche de la mort. Alors, on va l'appeler en fait, comme on va le définir, comme on définit un rêve, un épisode de conscience déconnectée, c'est-à-dire déconnectée de l'environnement, mais qui survient ici quand l'être humain est proche de la mort. Quand il est dans une situation critique ou quand il croit l'être. Et alors, ce qui est vraiment particulier avec les expériences de mort imminente, c'est qu'il y a vraiment des dimensions qui sont prototypiques, des dimensions récurrentes qui reviennent dans les différents témoignages. Donc, c'est vraiment, par exemple, la fameuse expérience de décorporation où on a l'impression de sortir de son corps, voir une lumière brillante au bout d'un tuel, rencontrer des entités, avoir une sensation d'harmonie, d'unité avec l'environnement, l'univers dans lequel on se trouve. Et donc, ça, c'est ça qui est vraiment particulier. Et alors, je dirais que c'est un des états de conscience modifiée, altérée ici, qui est le moins expliqué en science à l'heure actuelle, en comparaison au rêve où la recherche est beaucoup plus abondante, par exemple. D'où le fait d'aujourd'hui de continuer à chercher, de continuer à comprendre aussi ce qui se passe dans ces états de mort imminente. Quel pourrait être l'avenir, justement, des recherches par rapport à tout cela ? Alors, mes rêves, ce serait qu'on ait suffisamment avancé en recherche pour montrer à quel point les EMI sont un événement de l'être humain qui est hyper important et qui pourrait même être plus conscientisé et intégré, je dirais, en médecine. Ce que je veux dire par là, c'est que, en fait, quand on est proche de la mort, il semble que l'être humain puisse vivre un tas de phénomènes un peu particuliers qui ont des aspects un peu mystiques, comme les expériences de mort imminente. Et c'est pour ça que je pense que jusque là, la science les a mis pas mal de côté parce que ça avait un aspect un peu mystique qui pouvait peut-être faire peur ou qu'on pouvait penser peut-être à l'époque qu'on ne pouvait pas les expliquer. Et je pense que c'est hyper important, notamment quand je pense à toute la médecine qui est proche de la mort, les soins palliatifs, les soins d'urgence, les soins intensifs, etc. où je pense que notre société gagnerait de se rendre compte que l'être humain peut vivre des choses particulières et que ça peut avoir une influence sur comment il vive le moment, bien sûr, mais aussi pour ceux qui survivent et vont sortir de ces états critiques, avoir un impact important dans leur vie. Que vous disent les hommes et les femmes qui sont sortis de ces états critiques quand ils reprennent conscience, entre guillemets, conscience telle qu'on la conçoit aujourd'hui ? Qu'est-ce qu'ils vous disent ? Souvent, c'est assez intriguant parce que pour la plupart d'entre eux, pas pour tous, mais ils rapportent vraiment des grands changements dans leur vie à la suite de ça. Donc, ils disent que c'était une expérience qui a réellement chamboulé leur vie. Donc, à la suite de ça, ils vont prendre des décisions bien particulières qui vont changer leur vie. Ils vont aussi rapporter des attitudes, des comportements ou des croyances un peu différentes, comme par exemple, rapporter avoir moins peur de la mort, être aussi plus tourné vers tout ce qui est spirituel, être moins matérialiste, etc. Et donc, souvent, c'est des conséquences, je dirais, plutôt positives, où parfois, c'est des gens qui vont chercher à comprendre plus le sens de leur vie ou en tout cas, être plus dans une quête existentielle de ce type-là qui va leur apporter beaucoup. Mais il faut savoir que même si ces conséquences sont plutôt positives, pour la plupart d'entre eux, c'est en fait parfois très compliqué pour eux d'intégrer cette expérience qui a des aspects un peu extraordinaires. Ils sont sortis de leur corps, etc. Personne ne leur a posé de questions à l'hôpital s'ils sont passés à l'hôpital ou même dans leur enterrage. Or, ils ont vécu quelque chose qui a changé leur vie et maintenant, ils doivent vivre avec ça et intégrer cette expérience qui a des aspects un peu extraordinaires dans leur vie de tous les jours. On va revenir sur vos études, si vous le voulez bien, Charlotte Martial. Aujourd'hui, que sait-on et vers quoi peut-on aller ? Comment ça se passe concrètement ? Eh bien, une étude, parce que je suppose qu'on n'amène pas les gens à vivre une expérience de mort imminente comme ça. On va aborder ces différentes thématiques dans quelques instants. Charlotte Martial est notre invitée aujourd'hui. Elle est neuroscientifique au sein du Coma Science Group de l'Université de Liège. Elle étudie donc, entre autres, les états de conscience modifiés, mais aussi la mort imminente. Charlotte, comment on fait pour étudier la mort imminente ? Parce que je suppose que quelqu'un qui rentre, par exemple, en coma profond, qui aurait vécu un accident, on ne va pas appeler les équipes en disant voilà, on a un cas particulier. Donc, comment on fait ? Presque, en fait. C'est vrai ? On y est presque, oui. Mais c'est très compliqué. Mais donc, je dirais qu'il y a deux façons d'abord d'étudier ce phénomène qui, en effet, est imprévisible. C'est un phénomène qui survient quand on est proche de la mort. Et donc, en tant que chercheuse, c'est évidemment compliqué d'être là quand les personnes le vivent. Mais donc, il y a deux choses. Il y a un premier volet d'études où là, on fait des études prospectives, c'est-à-dire qu'on va suivre les patients à l'hôpital à leur chevet lorsqu'ils se réveillent. Donc, aux soins intensifs ou dans le service des urgences, c'est ce qu'on est en train de réaliser. Ici, avec ma collègue Pauline Fritz, qui réalise sa thèse sur vraiment les expériences de mort imminente qui surviennent à la suite d'un passage en salle de réanimation. On va suivre les patients qui ont été proches de la mort à l'hôpital, au CHU de Liège, et on les suit jusqu'à un an pour vraiment étudier ce qu'ils ont vécu, l'évolution du souvenir, mais également l'impact de ces expériences-là. Et alors, le fait d'être à l'hôpital, ça va nous permettre également de pouvoir approcher les mécanismes neurophysiologiques et cognitifs associés aux EMI. Donc, par exemple, l'étude qui est en train de se dérouler en ce moment en salle de réanimation dans le service des urgences du CHU de Liège, c'est que dès qu'il y a un patient qui rentre dans cette salle, le personnel soignant va nous appeler, en fait, et on va suivre toute la prise en charge de ces patients-là. Et quand on le peut, venir mettre également nos techniques, nos outils comme un EEG, donc ces fameux casques avec des électrodes qui permettent d'étudier l'activité électrique du cerveau. Et aujourd'hui, qu'est-ce qu'on sait du cerveau ? Qu'est-ce qu'on connaît déjà du cerveau quand on rentre dans ces états de modifié de conscience ou de mort imminente ? Alors, il y a encore beaucoup de questions qui restent ouvertes, mais ce qu'on sait, c'est que grâce à différentes études à l'hôpital, mais également en laboratoire, et ça, c'est le deuxième volet d'études dont je voudrais parler juste après, on sait qu'en fait, quand on vit ce genre d'état comme une expérience de mort imminente, on a une conscience, une complexité neuronale qui est plus augmentée dans certaines régions du cerveau, si vous voulez. Donc, la personne est dans une crise physiologique aiguë. Donc, bien sûr, le corps et le cerveau sont en grande souffrance. Donc, il y a certaines régions, si vous voulez, qui sont, entre guillemets, un peu plus éteintes, pas réduites à pas d'activité. Bien sûr, ici, je dis simplement moins d'activité dans certaines parties du cerveau, mais dans d'autres régions, au niveau temporoparietal notamment, donc c'est vraiment sur le côté de notre tête, on voit des connexions fonctionnelles plus importantes. Donc, on va avoir une augmentation de ces connexions dans ces régions qui sont en fait clés pour être conscient, qui sont vraiment des régions associées à ces épisodes de conscience très riches. 21 grammes. Vous saviez que j'allais poser cette question, évidemment. C'était un film. Il y a pas mal de croyances aussi sur le poids du corps qui s'allégerait de 21 grammes en cas de décès. Vrai ou pas vrai? Alors, non, pas vrai. C'est une étude qui n'a jamais pu être reproduite. Donc, par contre, c'était une étude qui est très ingénieuse. Donc là, c'est marrant. C'est les premières études, si pas la première étude, la première étude, pardon, qui va s'intéresser, entre guillemets, à l'âme, à l'esprit et se demander comment est-ce qu'on peut faire avec une technique scientifique, empirique, pour tester empiriquement ma question de recherche. Et donc, je pense que cette étude est très belle, je trouve, par l'idée et. l'ingéniosité qu'il y a derrière ça, mais seulement ici, ça n'a jamais été reproduit. Donc, à l'heure actuelle, on ne sait pas si, d'un point de vue scientifique, on ne peut pas décrire s'il existe une âme ou un esprit et sous quelle forme ça pourrait être. Mais par contre, avec les techniques qu'on a à l'heure actuelle, comme le GLIRM, etc., on peut étudier de façon objective l'activité neurophysiologique et le lier à notre conscience. Et c'est comme ça qu'on peut, par exemple, étudier des phénomènes comme les EMI. On a parlé d'une première manière, évidemment, d'étudier ces cas particuliers. La deuxième, c'est en laboratoire. C'est-à-dire que quoi ? Vous allez reproduire chez certains patients ou patientes un état de mort imminente ? En effet, c'est presque ça. Donc, d'un côté, on avait les études à l'hôpital. Et donc, évidemment, on se rend compte que c'est des études qui sont très coûteuses, très compliquées. Il y a un tas de défis à ces études-là qui sont hyper importantes. Mais du coup, ce qu'on peut faire, c'est en parallèle, avoir des études qui sont, entre guillemets, un peu plus simples, en laboratoire, qui sont plus courtes en tout cas, où on peut utiliser des outils pour vraiment induire ces états de conscience altérés. Et donc, dans le cas spécifiquement des EMI, ce qu'on a fait sur plusieurs années avec l'équipe, c'est qu'on a utilisé différentes choses. On a utilisé la réalité virtuelle, l'hypnose, des drogues également, des substances. Et plus récemment, on a utilisé l'asyncope, le fait de tomber dans les pommes. Parce qu'en fait, ces quatre méthodes, et on peut utiliser également la trans, c'est une publication qui va sortir dans quelques jours. Donc, ces cinq méthodes nous permettent d'induire chez monsieur tout le monde, entre guillemets. Donc, on invite simplement un volontaire en laboratoire. On utilise une de ces techniques et on va induire un état de conscience altéré. Ça veut dire que si demain je vous appelle, je peux vivre cette expérience, moi, en tant que cobaye ? Alors, une expérience subjective qui ressemble, c'est bien sûr pas une EMI authentique. Il faut prendre des pincettes ici, ça délimite ce genre d'études, bien sûr. Mais en effet, c'est possible. Et alors, ce qui est bien, c'est que comme vous serez en laboratoire, je vais pouvoir utiliser mes techniques qui sont plus faciles à utiliser ici, comme par exemple l'EG. Je vais pouvoir venir mettre un EG sur votre tête et voir ce qui se passe. À ce moment-là, via l'EG ou d'autres techniques. C'est marrant parce que le simple fait d'évoquer tout cela, moi, ça me stresse. Je suis en train de me dire, mais non, j'ai pas envie qu'on aille voir dans ma tête, etc. Donc, ça veut dire qu'entre les patients que vous allez étudier en salle de réanimation, par exemple, et ceux qui viennent dans le laboratoire, est-ce qu'il y a une différence d'interprétation de cet état ? Est-ce que leur questionnement après est différent ? Alors oui, bien sûr. C'est pour ça que ça délimite nos études en laboratoire. C'est que souvent, l'expérience qu'ils ont vécue ne va pas chambouler leur vie, comme c'est le cas d'une EMI chez quelqu'un qui a été proche de la mort en arrêt cardiaque ou autre. C'est sûr que c'est notamment dû au fait qu'en laboratoire, le participant est prévenu de ce qu'il va vivre. Et puis, ce n'est pas aussi intense, aussi riche, etc. que ces patients qui vivent ça de façon inattendue dans un contexte critique. Et je pense que c'est aussi vraiment particulier pour eux, pour ces patients, c'est d'avoir cette dissociation importante entre la situation critique, où pour certains, en tout cas, ils se rendent compte qu'ils sont proches de la mort, versus l'expérience qui était pour la plupart hyper « peacefulness », avec un sentiment de bien-être, etc., de paix, etc. Très belle. Et cette dissociation entre les deux, je pense, va notamment aider, va mener à ce que l'impact de cette expérience-là sera encore plus important. Charlotte Martial, vous êtes chercheuse. On le sait, depuis quelques années, la recherche est en manque de financement. C'est criant dans certains pays, dont la Belgique, dans d'autres aussi. Et puis, depuis quelques années, vous êtes à longueur de temps attaquée, que ce soit par des fake news, mais aussi par des groupements, voire même par des dirigeants politiques. Quel est votre regard aujourd'hui sur l'importance de la recherche dans notre société ? Je pense que c'est hyper important, au même titre que l'éducation, que la culture, etc. Et je pense qu'on est vraiment dans une période où on sent qu'une partie de la société est vraiment en train de perdre conscience, je pense, en la science. Et donc, comme si, pour certaines personnes, ils avaient difficile à comprendre l'importance qu'en fait la science a dans notre société, vu que c'est vraiment une des façons les plus efficaces, je dirais, d'approcher le monde. Alors, il y a d'autres façons, et ce n'est pas la seule, bien sûr, mais c'est grâce à la science qu'on a la santé publique, la médecine, que les programmes en médecine se font, qu'on connaît le monde, qu'on connaît l'espace dans lequel on vit, etc. Et donc, ça, c'est hyper important. Et donc, moi, je suis bien sûr super triste de constater que de moins en moins d'argent est alloué à la recherche. Je dirais qu'il y a des régions dans le monde où c'est bien pire. On le sait, notamment aux États-Unis, où on voit l'administration de Trump vraiment réduire de façon hyper importante les financements alloués à la recherche. Ça, c'est sûr, ça aura un impact dans notre vie de tous les jours, très bientôt. Ça va être à long terme, mais aussi, on va le sentir très bientôt, je pense. Et on va parler d'avenir avec vous, Charlotte Martial. On va parler justement de l'importance de l'étude de ces expériences de mort imminente pour la santé publique en général. Qu'est-ce que ça pourra nous amener demain, ces études ? Et on parlera aussi, évidemment, de manière plus philosophique, peut-être, de ce qu'est la conscience aujourd'hui. Qu'est-ce que ça veut dire être conscient ou inconscient ? Et si on parlait d'avenir avec vous, Charlotte Martial, neuropsychologue, vous étudiez, entre autres, les états de conscience modifiées, les états de mort imminente, etc. À quoi ça sert pour nous de connaître cela ? Parce que, vous le dites, pour la santé publique en général, c'est intéressant de comprendre parce qu'on va pouvoir développer des choses. On va pouvoir développer quoi ? Donc, je pense qu'une fois qu'on aura une bonne image de ce que c'est les expériences de mort imminente, comment on peut aussi induire ces expériences qui sont souvent vécues comme très positives ? Je pense qu'on pourrait les utiliser dans des contextes comme, par exemple, les soins palliatifs. Bon, on n'en est pas là du tout, mais je me dis que si la recherche se développe et montre qu'en fait ça a en effet des bienfaits d'aller vivre ces épisodes de conscience bien particuliers, quand bien sûr on est bien encadré dans un bon environnement et que c'est, disons, un environnement bienveillant, on pourrait les imaginer, les utiliser comme outils aux soins palliatifs. Quand les personnes se retrouvent proches de la mort, on pourrait peut-être induire en fait via, par exemple, des substances. On sait que certaines substances comme l'ADMT, la psilocybine, etc. peuvent induire en fait des expériences positives aussi riches que les expériences de mort imminente. On pourrait imaginer que, proches de la mort, on ait ça, notamment pour certains patients, qui le souhaitent comme outils pour en fait avoir, induire vraiment des sentiments positifs, premièrement, et puis une déconnexion de l'environnement pour peut-être faciliter le passage vers la mort. Moi, ça c'est par exemple une de mes idées. On pourrait imaginer qu'un patient ou une patiente en fin de vie qui souffre énormément, plutôt que de prendre des antidouleurs, vive des expériences comme celle-là. C'est vers ça qu'on va ou qu'on pourrait imaginer aller ? On pourrait imaginer ça, bien sûr. J'imagine qu'on ne pourrait pas réduire les antidouleurs totalement, mais par contre avoir peut-être une meilleure balance, je dirais, entre la médication donnée à ce moment-là et les états de conscience qu'on peut induire naturellement, via une trans, etc. Et donc, d'avoir, oui, une meilleure balance, que ce soit quelque chose peut-être un peu plus naturel, revenir vers quelque chose de naturel, parce qu'un peu plus naturel, je veux dire, dans le sens où je pense que l'étude des expériences de mort imminente et des états de conscience modifiées, plus généralement, nous montre qu'en fait l'être humain a ce talent de se dissocier de l'environnement, et ce sont des choses qui sont peut-être ancrées en nous, chez l'extrême humain, pour justement nous aider dans la vie de tous les jours. Et donc, moi, j'aimerais qu'on revienne plus à ça et qu'on se pose vraiment cette question, dans quelle mesure on peut les utiliser dans nos vies de tous les jours. C'est assez amusant, Charlotte Martial, je pense que s'il y a 20 ans, on parlait de ces questions, on nous aurait traité de fous. Aujourd'hui, quand on parle d'hypnose, on nous traite plus de fous. C'était encore le cas il y a quelques années. Quand on parle de trans, par contre, on risque de nous traiter de fous. Pourquoi ? En effet, j'ai l'impression qu'on est vraiment, depuis 5 ans, je dirais, on voit vraiment un intérêt plus important pour la trans et on voit les premières études neurophysiologiques qui s'intéressent vraiment aux mécanismes associés à la trans et qui testent, de la même façon qu'on a testé l'hypnose il y a quelques années ou dizaines d'années, qui testent la trans comme outil pour certaines pathologies. Et ça, c'est vraiment le travail de nos collègues au Giga Consciousness, notamment d'Audrey Vandeneuze et d'Olivia Gossery, qui sont en train de réaliser différentes études plus fondamentales, mais également plus cliniques, pour comprendre comment, également, on pourrait utiliser la trans, de la même façon que l'hypnose est utilisée à l'hôpital, dans certains contextes. Lesquels, par exemple ? On va essayer d'être concret. Quelles sont les pistes de recherche ? Alors, ça peut aller de l'utiliser pour induire, donc, chez des patients qui, par exemple, souffrent de douleurs chroniques. La méditation, l'hypnose ou la trans, en fait, peuvent être utilisées dans ce contexte-là, où ils apprennent à utiliser un de ces outils ou plusieurs. Et alors, dans leur vie de tous les jours, ils peuvent l'utiliser pour se mettre dans des états de conscience modifiés qui, en fait, vont les éloigner, vont les déconnecter de leurs douleurs, plus ou moins fortement, en fonction de leur état de déconnexion. Et donc, ça, c'est un outil qu'ils peuvent utiliser, par exemple, un peu tous les jours et qui peut-être, parfois, amène à réduire les antidouleurs ou ce genre de choses. Avec des résultats concrets, déjà, aujourd'hui, ça fonctionne pour certaines pathologies ou certaines douleurs, par exemple ? En tout cas, on montre les bienfaits, oui, de la trans. Une publication qui est sortie, je pense, l'année passée, d'une publication de mes collègues, Olivia Gossery et Odréva Doneneuze, ont montré, en effet, les bienfaits de la trans, au même titre que la méditation et l'hypnose, chez des patients qui avaient des douleurs chroniques. Donc, ça, c'est une étude qui est sortie, mais ils ont d'autres études en cours, également. Et on rappelle que ce sont donc des études scientifiques. En effet. Non, mais c'est drôle de devoir le rappeler. Et en même temps, je le fais naturellement, parce que je sais que ça va susciter des questionnements, évidemment, de la part de nos éditrices et auditeurs, de se dire qu'aujourd'hui, on étudie la trans, alors qu'on a tous l'image de chamanes bien éloignés, etc. Avec, évidemment, tout le côté un peu rêve que ça peut induire, ou en tout cas mystique que ça peut induire. Mais non, aujourd'hui, c'est utilisé. Oui, et je pense que c'est ça, en fait. Là, ce que vous dites, c'est vraiment quelque chose que moi, je vis tout le temps. C'est vraiment que je vois qu'il y a souvent un décalage entre comment le grand public va s'emparer de cette thématique-là, des états de conscience altérés-là, et comment la science l'aborde. C'est très différent, évidemment. Notamment, le phénomène des expériences de mort imminente suscite pas mal de questions spirituelles, philosophiques ou même existentielles. Et donc, bien sûr, ça passionne beaucoup de gens. Et alors, il y a évidemment beaucoup de questions, de croyances qui sont associées. Et puis, on a la science qui, du coup, ne l'approche pas du tout de la même façon. Peu importe les croyances, on part vraiment de questions bien spécifiques. On essaye de le tester empiriquement. Et là, il ne faut pas avoir peur, bien sûr, en science, de dire que la réponse qu'on obtient, elle est partielle, incomplète, elle n'est pas identique, elle ne correspond pas à nos attentes, etc. Et donc, c'est très différent. On a deux approches très différentes. Mais ça, c'est sûr que moi, qui travaille sur ça tous les jours, je vois bien que dès que j'entends parler des EMI dans les médias, il y a parfois des choses qui sont plus dogmatiques, etc. Ou la façon dont c'est présenté, ça ne représente parfois pas ce qui est découvert en science. Et donc, ça, c'est parfois un peu compliqué. Mais depuis 10-15 ans, je pense que les scientifiques du monde entier s'intéressent de plus en plus à ces états-là. Et on va vraiment découvrir des choses hyper intéressantes dans les années à venir. Avec quelles limites ou quelles barrières que vous allez vous mettre quand on évoque, évidemment, vous venez de parler de l'aspect mystique. Certains vont parler d'aspect religieux aussi. Quelle est pour vous, en tant que scientifique, la limite que vous n'allez pas dépasser? Est-ce qu'il en existe une ou est-ce que la science doit aller au-delà des limites pour un moment pouvoir faire marche arrière, se dire là, on a été trop loin? Moi, je dirais qu'il y a une limite que tout chercheur doit être conscient, surtout en travaillant sur ces thématiques-là. C'est vraiment de se dire que moi, je vais jamais... Je vais m'intéresser à l'interprétation que les gens vont donner de ces expériences-là. Mais par contre, je ne vais jamais avoir mon mot à dire, entre guillemets, sur l'interprétation qu'ils ont donnée. En plus, de toute façon, elle est chaque fois tellement singulière et bien particulière qu'elle est unique. Mais moi, je vais m'intéresser à comment ils interprètent l'expérience, l'impact, etc. Mais par contre, je ne vais jamais avoir un mot à dire sur l'interprétation. Donc, ça, c'est vraiment faire récolter des données objectives qui sont parfois du contenu des croyances, etc. Mais par contre, ça, c'est juste descriptif, entre guillemets, et on ne va pas aller plus loin que ça. Mais si on va très loin, est-ce qu'on pourrait bouleverser nos croyances dans 10, 20 ans ou 50 ans ? Mais je pense que ce qu'on va découvrir pourrait changer nos croyances, ou en tout cas, pour avoir une implication sociétale, éthique. Les recherches qu'on fait plus généralement sur la conscience, qu'est-ce que c'est être conscient ou qu'est-ce que c'est être inconscient ? Voilà, ça a des implications sociétales, éthiques, hyper importantes. Et donc, nos résultats en recherche vont avoir des applications dans différents domaines, juridiques, en médecine, etc., dans différents domaines. Mais par contre, je pense qu'on reste des êtres humains et qu'à chaque fois, on aura aussi nos propres croyances et interprétations d'une situation vécue ou d'un phénomène. Ça veut dire quoi être conscient et inconscient aujourd'hui ? Qu'est-ce qu'on sait ? On sait en tout cas que la frontière est floue, complètement floue, entre guillemets, dans le sens où on a des critères qui nous définissent ce qu'est un état conscient. Mais par contre, il faut savoir qu'il n'y a aucune définition communément acceptée en science de qu'est-ce que c'est la conscience. Moi, j'ai une définition bien particulière, mais un mathématicien ou un philosophe ne va bien sûr pas avoir la même définition que moi. Mais donc, qu'est-ce que c'est la conscience ? C'est pour ça que les études qu'on réalise, notamment chez les patients qui sont en coma ou ces fameux états d'éveil non répondant, donc ces patients post-coma qui ont eu des lésions cérébrales très importantes, mais qui ne récupèrent pas conscience, mais qui ont des réflexes, sont hyper importantes. Et donc, là, on touche vraiment des questions qui sont abordées en science, mais qui, bien sûr, ça dépasse la science après ça, dans le sens où c'est de façon inhérente, humain, et ça touche à tous nos moments de la vie. Charlotte, Marcel, est-ce que parfois ça fait peur ? Vous, en tant que scientifique, vous dites « Waouh, là, on est en train de mettre le doigt sur quelque chose qui va bouleverser, peut-être, notre manière de voir les choses. » Je dirais oui, notamment sur la thématique des EMI, c'est assez « facile » d'avoir cet étonnement, parce qu'il y a très peu d'études scientifiques sur la thématique, et donc, je dirais presque tous les mois quand on a une nouvelle idée ou un nouveau résultat, chaque étude prend du temps, mais on a des nouvelles idées tout le temps, et des nouveaux questionnements, et je dirais qu'à chaque fois qu'on a des nouveaux résultats, on a encore plus de questions après, en tout cas sur cette thématique-là. Vous êtes maman de deux petits-enfants, si ma mémoire est bonne, dans 20 ans, qu'est-ce qu'ils vivront, eux, vous pensez, par rapport à ça ? Est-ce que la science aura suffisamment évolué, ou bien ça va encore être long ? Je pense que ça prend du temps. En science, je crois qu'on ne se rend pas compte tant qu'on n'est pas dans le processus, mais tout prend du temps, et c'est pour ça que parfois les financements doivent être importants pour pouvoir avoir des études qui sont rigoureuses, etc., et qui sont suffisamment intéressantes et complexes pour qu'on puisse trouver des résultats intéressants, mais en même temps, depuis 50 ans, je dirais, la science nous explique de plus en plus sur ce qu'est la conscience, donc je pense que dans 20 ans, il y aura eu des gros changements, enfin, si on en a toujours des financements toujours aussi adéquats ou plus importants que ce qu'on est en train de donner en ce moment, mais non, je pense que dans 20 ans, on aura découvert des nouvelles choses, et en plus, je pense qu'avec le développement de l'intelligence artificielle, ça va venir chambouler et sûrement accélérer certaines découvertes. On va se déconnecter un peu ? Dans quelques instants, déconnexion, ça vous connaissez, évidemment, au sein de votre laboratoire. Titres pour la déconnexion, c'est l'artiste français Rohan Erwan, et ce titre, réalisé en collaboration avec l'Orchestre National de Lyon, c'est très étonnant, mais en même temps, ce n'est pas étonnant, Charlotte Martial, parce que j'ai l'impression que c'est le genre de musique qui pourrait nous amener en trance. Or, on parle de déconnexion ! C'est vrai ! Oui, j'avoue que j'ai cette tendance à aimer des musiques qui peuvent être tellement intenses à certains niveaux que ça pourrait nous mener en trance. Et oui, ça, c'est vraiment un morceau que j'apprécie beaucoup, notamment parce qu'il lit la musique électronique et des instruments ici, donc avec un orchestre. L'Orchestre National de Lyon, oui. C'est ça exactement, parce que j'aime les deux en fait. J'aime beaucoup la musique électronique et puis en même temps, j'adore, j'ai fait du piano aussi pendant des années. J'adore vraiment les instruments et des types de musiques comme le jazz, etc. Et je trouve que ce morceau peut nous mettre en effet dans un état un peu particulier, juste de l'entendre, peu importe le contexte. Très rapidement, c'est vrai que la danse peut nous amener dans des états de trance. Aujourd'hui, c'est prouvé, ça ? Oui, oui, la trance peut être induite via la danse. Et je pense que si vous parlez à n'importe quel musicien, il pourrait vous dire aussi que dans un de ses concerts, ou souvent, peu importe, mais que la musique, le fait de jouer de la musique et le mouvement en plus de la musique peut le mettre dans un état de trance. En fait, il faut savoir qu'on peut se mettre dans un état de trance via n'importe quelle technique, entre guillemets, n'importe quel son, quel mouvement, etc. Ça pourrait un jour être enseigné à l'école, ça, la trance, vous pensez, d'ici dix ans ? J'espère, en tout cas. C'est vrai, vous espérez, oui. J'espère, oui. Pour ceux qui le souhaitent, bien sûr, pas forcer les choses, mais je pense qu'avoir des moments de déconnexion est hyper important, surtout dans notre société actuelle où tout va très vite, tout le temps, où on doit être performant tout le temps. Et je pense que la méditation commence à être parfois apprise dans certains cours, peut-être pas à l'école, mais en tout cas dans des stages, etc. Avoir des moments calmes comme ça, des moments de déconnexion, je pense que la trance pourrait aussi. Et un joli paysage peut aussi nous amener à déconnecter. C'est votre photo que vous nous envoyez. On a une prairie en avant-plan et puis une colline avec un vieux château, une église. Et puis à l'arrière, des montagnes. Elle a été prise où, cette photo ? Ici, en Savoie. C'était cet été. Alors, je n'aime pas particulièrement la montagne, mais être dans la nature, c'est réellement quelque chose qui va m'aider à me déconnecter. Donc là, c'est une photo parmi d'autres. Ce que j'aime bien, c'est aussi changer d'endroit et j'ai la chance de pouvoir aussi voyager avec le travail que je fais. C'est de pouvoir voyager et découvrir chaque fois des nouveaux endroits. Et je pense que la nature m'aide en tout cas à pouvoir me déconnecter, même si ce n'est pas facile. Et scientifiquement, c'est prouvé aussi que la nature fait du bien. Exactement, ça nous reconnecte à nous-mêmes, à nos émotions, à tout ce qui est naturel et à l'environnement. Charlotte Martial, merci d'être passée dans notre studio. On vous invitera encore dans quelques années pour avoir les résultats de toutes vos recherches et essayer de comprendre aussi de plus en plus ce qui se passe dans notre cerveau. Ces états de trance, ces états d'hypnose, etc. Ces états de conscience modifiée ou de mort imminente. C'était passionnant. On va inviter vos collègues aussi très, très bientôt dans le cadre de Tendances Premières pour la nouvelle saison de Tendances Premières. pour essayer d'aller un peu plus loin et voir à quel point nos scientifiques en Belgique sont parfois formidables et on n'en entend pas suffisamment parler de ces scientifiques. Merci beaucoup Charlotte Martial. On vous invite évidemment à entendre ou à réécouter ce Tendances Premières dans quelques instants sur OVIO comme la série estivale avec toute une série d'invités qui sont passés chez nous. N'hésitez pas à aller faire un petit tour sur OVIO, sur les différentes plateformes. Abonnez-vous aux différentes plateformes et à cette émission. On n'hésite pas non plus à mettre des étoiles, ça nous aide beaucoup pour être mieux référencés. On termine ce Tendances Premières avec Pete Doherty et Pot of Gold. Merci d'être avec nous sur la première. Retrouvez tous les podcasts de la RTBF dont de nombreux inédits sur RTBF OVIO.

Key Points:

  1. Charlotte Martial, a neuroscientist, discusses altered states of consciousness, near-death experiences, and related phenomena.
  2. She explains the research focus of the Coma Science Group at the University of Liège.
  3. Martial's interest in neuroscience was sparked during her youth and dance background.

Summary:

In this transcription, Charlotte Martial, a neuroscientist, delves into topics such as altered states of consciousness, near-death experiences, and related phenomena. She sheds light on the research conducted by the Coma Science Group at the University of Liège, focusing on themes like death, near-death experiences, altered consciousness states, and shamanism. Martial reflects on her youth, mentioning her passion for neuroscience that was ignited during her university years. She emphasizes the importance of studying these phenomena, despite societal skepticism, and highlights the potential benefits of integrating such research into everyday life. Martial also addresses the complexities of studying near-death experiences and altered states of consciousness, discussing both prospective and retrospective research methods.

FAQs

La conscience est l'état d'être conscient de soi et de l'environnement.

Un état de conscience modifié survient lorsque la conscience est dissociée de l'éveil ou de l'environnement.

Un rêve est un épisode de conscience déconnectée de l'environnement, avec une activité cérébrale spécifique.

Une expérience de mort imminente est un épisode de conscience déconnectée qui survient lorsque l'être humain est proche de la mort.

Étudier ces états peut avoir un impact positif sur la santé publique et le bien-être des individus.

Les personnes rapportent des changements importants dans leur vie, comme une diminution de la peur de la mort ou une quête existentielle.

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