#6 - Marc Duquesnoy (L'Oréal): "Il faut saisir ce qui commence, c’est ‘ma’ règle d’or du marketing"
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Avec 21 années passées au sein de L’Oréal – considérée comme une véritable école du marketing –, l’expérience de Marc Duquesnoy, en matière de marketing digital comme de construction de la notoriété online d’une marque, est indéniable. Dans ce nouvel épisode du podcast CMO voices, il revient sur son parcours, les évolutions du secteur de la beauté et les secrets de son entreprise pour rester au top. Pour aller plus loin? CMO voices a également une série de podcasts en néerlandais. Écoutez ici les épisodes avec Ewoud Van De...
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Bienvenue dans CMO Voices, le podcast des professionnels qui réinventent le marketing. CMO Voices, c'est maintenant. Soyez les bienvenus dans ce podcast spécialisé dans le marketing et produit par UBA et Trust Media. 30 minutes durant lesquelles je donne la parole à un CMO, un Chief Marketing Officer reconnu par toute la profession. Aujourd'hui, il n'y a personne que je reçois, française, et reconnu par sa grande expérience en expérience digitale et en construction de la notoriété online de sa marque. Avec 21 ans d'expérience dans une entreprise considérée comme une véritable école du marketing, il est aujourd'hui Chief Digital Marketing Officer. Vous croisez leurs produits tous les jours. Dès votre réveil, ils sont sans doute top of mind car ils figurent sur vos listes de courses hebdomadaires. Un résultat qui s'explique probablement par le travail de mon invité et de ses collègues. Parce que oui, oui, le marketing ne sert à rien sans un bon produit. Mais un bon produit n'existe pas sans un bon marketing. Notre expert aujourd'hui travaille chez L'Oréal Group. Bienvenue Marc Duquenois. Bonjour Gounel. Et moi, je m'appelle Guenel Anquet, fondateur d'une agence de branding passionnée depuis quasi 30 ans par la façon dont les marques se positionnent, communiquent et vivent. Marc, fidèle à la tradition, nous avons contacté ton environnement professionnel pour qu'il te présente. Ils sont 4 et travaillent chez L'Oréal eux aussi. Ils sont Jean-Baptiste Dalle, Directeur Général L'Oréal Benelux, Quentin Lanotte, Chief Digital Officer Division Produits Professionnels, Elisabeth Marceau, Directrice de l'Advocacy Marketing et Anna Mellara, Head of Innovation. On les écoute ? Allez, c'est parti. Ce qui fait de mon point de vue de marque un très très grand homme de marketing, c'est d'abord sa capacité à comprendre le consommateur. Il a vraiment ce talent d'identifier leur comportement visible mais aussi de déceler leurs besoins plus profonds, presque inconscients. Et c'est reconnaître les changements qui se produisent afin de pouvoir anticiper sur les priorités que doit avoir notre groupe. Marc, c'est surtout un curieux. Il incarne l'esprit poète et paysan de la culture L'Oréal. Elle a une mission créative, les poètes, un sens pratique et une exécution concrète, les paysans. A la fois rêveur et faisseur. Ensuite Marc, c'est évidemment un expert indéniable de la beauté et du marketing. Après une carrière très riche et variée, qu'il a fait passer de rôles globaux à locaux, il a développé une vraie connaissance de la cosmétique en général. La deuxième caractéristique de Marc est la capacité à voir les choses en grand. Faire moins de projets mais de les faire d'une manière assez spectaculaire. Et enfin Marc, pour moi, c'est un vrai people manager. Il est capable de fédérer des équipes pour faire bouger les lignes du marketing. Il possède des qualités pour stimuler, guider, motiver les gens et les faire changer de mindset, priorité, etc. Donc un vrai challenge en soi. Les véritables leaders du marketing se distancent sûrement pour leur capacité d'écoute. Et c'est sans aucun doute la plus grande qualité de Marc. Ça combiné avec une très bonne vision stratégique fait de Marc un des meilleurs marketeurs de L'Oréal. Alors on n'a honnêtement pas dû trier les réactions, ça fait plaisir non ? Ah oui ça fait plaisir, je crois qu'on peut s'arrêter là même. Bon alors on va pas s'arrêter là mais c'est vrai que 21 ans chez L'Oréal, tu nous retraces un petit peu ta carrière ? Oui donc 21 ans, donc généralement je dis que je suis un bébé L'Oréal. J'ai fait à peu près la moitié de la carrière du marketing dans la division grande consommation. Et puis à un moment donné, j'ai échangé vers une carrière plus digitale. Aujourd'hui évidemment les deux se recoupent à 100%. Et je dirais aussi que j'ai eu la chance de commencer sur le marché français, en marketing à la fois opérationnel et développement. J'ai pu avoir des jobs au niveau Europe, monde aussi, ce qui m'a permis de voyager un peu dans les différentes filiales. Et puis dans différents pays, j'étais au Danemark et aujourd'hui je suis basé à Amsterdam pour le Benelux. Top, on est ravi de t'avoir aujourd'hui à Bruxelles. Tu viens de retracer ton parcours là au sein du groupe L'Oréal, tu connais donc fondamentalement bien ton marché. Est-ce que tu peux nous parler en quelques mots de son évolution sur ces dernières années ? Tout à fait, bon déjà vraiment c'est un marché passionnant. Et je crois ce qu'il faut retenir c'est que la beauté est toujours un marché dynamique. Pourquoi ? Parce qu'il y a des caractéristiques immuables et des évolutions, donc tu poses la question. Ce qui est immuable c'est que la beauté reste un besoin essentiel des individus, de l'homme, des femmes, depuis l'Egypte qui a inventé les premiers eyeliner jusqu'à nos jours. Donc il y a toujours un besoin, un appétit pour la beauté. Après, clairement, le marché a évolué. Ça reste quand même un marché drivé par l'offre. On dit toujours chez L'Oréal, on y trouve ce qu'on y met dans le marché. Plus on innove, plus on apporte dans le marché, plus le marché se développe. C'est un peu la magie de ce marché. Et à titre d'exemple, les nouvelles générations plus exposées aux réseaux sociaux découvrent plus rapidement qu'auparavant des nouvelles offres, des nouveaux gestes. Et du coup, ça emmène et ça développe ce marché. Donc je dirais, oui, voilà un marché qui continue de croître. Il y a une sensibilité qu'on appelle parfois au prix, mais pour nous, on parle plutôt qualité ou rapport qualité-prix, qui est évidemment quelque chose d'important, mais ça fait le lien avec l'innovation. Il faut pouvoir se démarquer, apporter de la valeur ajoutée pour répondre à nos consommateurs. Vous êtes un grand industriel, connu dans le monde entier depuis très longtemps. Vous avez l'habitude de donner le rythme. Et puis c'est vrai que depuis quelques années, il y a un tas de nouveaux acteurs, que ce soit des entrepreneurs ou même le retail, qui sont aujourd'hui bien plus présents. C'est un marché qui est devenu hyper concurrentiel. Comment est-ce que tu fais, comment est-ce que vous faites chez L'Oréal pour maintenir vos parts de marché ou voire continuer la progression, l'amélioration ? Déjà plusieurs éléments. C'est bien que le marché soit dynamique et compétitif. Ça nous permet de rester éveillés, de se dépasser. Je dirais aussi qu'évidemment, les parts de marché sont notre objectif principal, mais pour faire écho à ce que je disais avant sur le marché, l'objectif numéro un, c'est de grandir le gâteau avec nos partenaires distributeurs, parce qu'on a encore beaucoup d'opportunités de pénétration des consommateurs, de développement. Si je reviens à ta question, comment on fait pour rester compétitifs ? Basiquement, je dirais du travail de la créativité, de manière plus pragmatique et stratégique. Un, c'est l'innovation. Il faut se souvenir que L'Oréal est parti il y a un siècle, a été créé par un chimiste qui a été le premier homme à créer la coloration permanente à l'ammoniaque, Eugène Schweller, qui est le fondateur de l'entreprise. Cet ADN d'innovation a perduré et c'est le driver. Aujourd'hui, je crois qu'on investit un milliard d'euros dans la recherche, il y a 4000 chercheurs. Je ne vais pas faire tout le dépliant, mais c'est important et derrière, ça amène la compétitivité de nos marques. Le deuxième point important, c'est le portefeuille de marque. La force du groupe, ou en tout cas ce qu'on peut amener sur le marché, c'est un ensemble de marques qui parle à différents consommateurs, différents besoins. Donc si jamais il y a une marque qui est peut-être moins en croissance, une autre va prendre le relais parce qu'on a vu un relais de croissance. Et du coup, je pense, je fais le lien sur aussi une histoire de tempo et de timing, un peu comme en sport, il faut être là au bon endroit au bon moment. Et chez Loral, on dit souvent, il faut saisir ce qui commence. Je prends un exemple un peu concret, qui parle plus ou moins en maquillage. À un moment donné, l'explosion des produits pour les sourcils a été quasiment aussi grande que les mascaras aujourd'hui. Le groupe s'est positionné assez vite. Le soin du visage, évidemment, explose. Sur les masques de soins, on va bientôt lancer des patchs pour l'acné, etc. On aura beaucoup de sujets, mais il faut être aussi là au bon moment. Et je crois que Jean-Baptiste en parlait aussi dans ma présentation. Il faut jouer gros au moment où ça arrive. Il faut prendre le pari et parfois se tromper, mais prendre le pari et aller gros avec des gros investissements, qui est aussi le modèle Loral, d'avoir suffisamment d'investissement en arrière, de penser gros, d'y aller fort et d'apprendre assez vite ce qui marche. Et comme on est un groupe mondial, on voit assez vite ce qui prend, prend pas dans des marchés qui peuvent lancer en amont, comme l'Angleterre ou l'Espagne, etc. Et on apprend ce qu'on appelle des best practices, des meilleures recettes qu'on essaie de vite appliquer sur les terrains. Par exemple, aujourd'hui au Benelux, entre la Belgique et les Pays-Bas, peut-être qu'un pays va lancer plus vite. On voit ce qui marche et on s'adapte. Donc c'est à la fois, je dirais, en résumé, des marques avec beaucoup d'innovation, des gros lancements, on prend des paris, sans rester un trop gros paquebot. On aime se penser aussi à une flottille de petites marques qui peuvent tourner à gauche, à droite, assez vite. Mais justement, tu as ces marques driveées par l'innovation, comme tu dis, vous avez un grand portefeuille. Comment est-ce que vous faites pour qu'elles ne se cannibalisent pas trop entre elles ? C'est un bon point, c'est une bonne question. Déjà, ce sont des circuits souvent différents, que ce soit en supermarché, la pharmacie, chez nos partenaires coiffeurs. Au final, il y a quand même un travail de positionnement de chaque marque. Ça part en amont des définitions des marques, où on se dit que chaque histoire doit parler à un besoin ou un consommateur. Ce n'est pas forcément un consommateur, parce qu'en fait, la complexité, la beauté, c'est qu'après, on le sait nous-mêmes. On est nous-mêmes plusieurs consommateurs. Je crois qu'on fait à la fois nos courses dans certains discounters et puis de temps en temps, on aime bien aller chez une enseigne un peu plus premium. On zappe. On a plusieurs marques et il faut être là au bon rendez-vous. Et aujourd'hui, j'aime bien de plus en plus parler de part de marché de la salle de bain. En anglais, on dit de Bass Room Market Share. On nous dit, quel est ta part de marché sur ton circuit ? C'est important parce qu'on se bat un peu par circuit. Mettons la pharmacie ou à nouveau nos grandes anciennes de grande consommation. Mais il faut prendre ce recul nécessaire. Et j'en viens à ta question, que le consommateur est multiple. Il faut parfois regarder un peu nos parts de marché totale dans nos salles de bain. Et là, c'est normal qu'il y ait un laroche posé, un lancôme, un garnier dans le panier du consommateur. Ça, c'est un point de vue qui parle plutôt d'un maillage, d'un chaînage de l'offre plutôt qu'une cannibalisation. C'est plutôt un portefeuille complet. Exactement. Et après, il y a quand même une petite part d'émulation interne, je ne vais pas te le cacher. Il y a un esprit un peu compétitif en interne avec beaucoup de Beyoncé, mais cette émulation interne de le meilleur qui saute sur cette tendance et une marque qui va plus vite que l'autre, ça permet aussi en interne de faire une compétition interne. Plutôt simple. C'est plutôt ça. Alors Marc, le grand public ne comprend pas toujours nos métiers du marketing, il faut être honnête, ou du branding, voire de la com. Est-ce qu'il y a un cliché ou une idée reçue que tu ne veux plus du tout entendre là, aujourd'hui, 2025 et pour les années qui viennent ? Oui, j'entends beaucoup parler de, et une partie est vraie évidemment, faut te nuancer, mais d'un marketing automatisé, d'un marketing algorithmique qui, si on fait un raccourci aujourd'hui, on pourrait se dire, on appuie sur un bouton, il y a l'intelligence artificielle et on va avoir le plan marketing parfait et en voiture, Simon, on y va. C'est pas comme ça ? Ça ne fonctionne pas comme ça ? Et non, je crois que ça reste un peu plus, c'est la beauté du point. Ça reste un peu plus compliqué. Je pense que c'est un art. Allez, on y va, j'ose le dire, mais au sens artisan du terme, avec quand même beaucoup de travail, il faut avoir un talent, une intuition, beaucoup de travail. Et je crois que dans l'introduction, c'est Anna qui disait, le poète et le paysan, c'est un point assez fort dans la culture l'Oréal. Il faut à la fois être paysan, c'est-à-dire les pieds sur terre, la bonne gestion, le travail, se lever tôt, la résilience. Et puis un peu poète, c'est cette part plutôt d'intuition, de créativité, de raconter des histoires. Et ça, je ne pense pas qu'on ait trouvé la formule magique même d'intelligence artificielle pour aller chercher l'histoire qui parle au cœur des consommateurs. Allez, Go, on attaque un premier chapitre, ce qu'on appelle le coup dur. En bref, la mauvaise passe, la période trouble, une situation de turbulence qui t'a marqué. Est-ce qu'il y en a une mauvaise d'expérience dans ta carrière que tu voudrais nous partager et de laquelle tu as appris quelque chose, en fait ? Une bonne situation de turbulence. Du coup, j'étais directeur marketing des pays nordiques, incluant le Danemark. Et au Danemark, le marché a été disrupté, s'est retourné à cause du panorama des retailers. Donc, un nouvel entrant est arrivé. On ne l'avait pas forcément dans nos panels. En même temps, je dirais qu'il y avait l'explosion du e-commerce. On n'a pas forcément, à ce moment-là, vers 2015, été assez rapide dans ce marché. Et je me suis retrouvé en tant que directeur marketing à devoir couper et revoir assez vite les plans marketing, notamment les plans médias. Et là, je me souviens avoir essayé de protéger un peu tout, couper un peu de ci, de là. Et au final, on se retrouve avec un plan marketing qui ne veut plus rien dire. Les campagnes sont trop courtes, les vagues sont trop courtes. Finalement, on perd l'impact. L'équipe se démotive. On ne fait ni un bon travail. Je pense que je perdais en lucidité. Donc, c'était, je dirais, un assez mauvais souvenir. Et alors, dans des situations comme ça, si tu devais refaire le game là-dessus, c'est quoi ? Comment est-ce qu'on gère cette logique de décroissance ? Justement, je pense qu'il faut... On gère la décroissance par la croissance, si j'ose dire. Au lieu d'essayer de tout protéger, tout faire, il faut prendre du recul, rester stratégique et choisir quels sont ses gros coups, ses gros combats. Et comme je le disais, la beauté, il y a toujours des opportunités. L'idée, j'aurais pu garder plus de lucidité et dire, maintenant, on va choisir de manière plus forte. Au lieu de faire trois choses un peu moins bien, on va en couper une, on va en faire deux très bien. Et il faut revenir sur nos fondamentaux, rester là où ça va marcher. Par exemple, je fais un parallèle avec le sport. J'adore le rugby. Je ne sais pas si, parfois, vous êtes dans ces moments de mi-temps, des matchs compliqués. Et l'entraîneur dit, mais là, il faut revenir sur les fondamentaux, plaquer, replaquer. On sait ce qui va marcher, nos bonnes marques, nos bonnes animations. Et réamorcer la pompe pour retourner sur la croissance. Et donc, choisir ses combats et y aller à fond, en fait. Donc, c'est clair. Oui, exactement. Est-ce que tu as retiré d'autres leçons de cet échec ? Eh bien, l'autre leçon est dans un monde, aujourd'hui, où il n'y a pas de turbulences. On se dit toujours qu'il faut planifier pour le meilleur et se préparer pour le pire. Marc, ton coup de maître, tu m'en as un petit peu parlé, est un peu lié à ton coup dur et à ce que tu as appris de ce coup dur. Tu peux nous expliquer un petit peu ? Un peu lié au coup dur, parce qu'un des coups de maître, je pense, c'est pendant la crise du Covid et à la sortie de la crise du Covid, où tout le monde s'est dit, d'un point de vue marketing, qu'est-ce qu'on fait ? Et c'est justement ce moment-là, je pense que le groupe EGT, à ce moment-là, directeur média de l'Europe, on s'est dit, mettons les investissements là où les consommateurs attendent, là, on peut développer nos marques. Et à ce moment-là, je pense qu'on a accéléré sur le marketing de l'influence pour des créateurs. C'est pas nouveau. En interne, on appelle ça de l'advocatie. C'est faire appel à toutes ces communautés de créateurs qui adorent nos marques, parlent de nos marques, vont découvrir des innovations en avant-première et vont en parler avec leurs termes aux consommateurs. Et les consommateurs vont adhérer d'une manière plus forte parce que c'est aussi un point de vue plutôt dans leur langage, plutôt au travers de la communauté. Et je dirais qu'au moment du Covid, tout le monde était chez soi. Il y a aussi une explosion, plus que jamais, de la consommation des réseaux sociaux. C'est là aussi où TikTok a explosé en Europe. Et je pense qu'on était très bien positionnés sur la ligne de départ pour accompagner ces créateurs et finalement garder une vraie visibilité de nos marques. Un moment où les gens se sont repliés plus sur les réseaux sociaux et on l'a gardé et ça se développe aujourd'hui. Et je pense avec pas mal d'humilité parce qu'après, j'ai appris des autres pays, mais d'avoir poussé pour prendre des paris sur TikTok et les autres plateformes. Et je pense que ça a payé. Je ne l'ai pas fait tout seul dans mon coin. Je n'avais pas ma boule de cristal. J'ai regardé ce qui se passait. Je me souviens, en Espagne, il y avait des premières campagnes un peu virales à travers, notamment TikTok. On a engagé avec d'autres pays pour poursuivre. Et puis voilà, il y a une émulation interne. Et je pense qu'on a pris la vague au bon moment. Et ça nous a donné un vrai temps d'avance à la sortie du Covid. Peut-être certains concurrents, que je comprends et respecte, avaient géré autrement leurs investissements. Mais on était au rendez-vous, notamment à travers ce gros Paris. Alors, il y a 21 ans. Mais bon, tu te souviens quand même de tes débuts chez L'Oréal. Qu'est-ce qui a changé dans leur approche aujourd'hui par rapport à tes débuts ? Contre pied, j'ai envie de dire, beaucoup de choses n'ont pas tellement changé. Mais quand même, ce qui a changé, c'est la digitalisation, clairement. Et à deux niveaux. Digitalisation, notamment du monde marketing. Ça, je crois que tout le monde est assez à l'air du sujet. Et le groupe aussi se positionne de plus en plus comme un groupe de ce qu'on appelle beauty tech, beauté technologique. Qui a à la fois une vraie révolution interne de comment la tech va nous aider dans les recherches développement. Aujourd'hui, il y a beaucoup d'intelligence artificielle dans nos processus de développement. Je pense, par exemple, quand on cherche aujourd'hui les nouvelles, les meilleures couleurs, colorations, maquillages, hauts points de cheveux. Le fait d'avoir des grandes bases de données à un niveau monde. Mais de les processer avec de l'intelligence artificielle. Ça permet de faire un peu, justement, des proof of concept. Des tests en amont. Et gagner beaucoup de temps dans le développement des produits. L'intelligence artificielle à travers la data. Donc aujourd'hui, il y a beaucoup aussi d'efforts de nettoyage et de construction de grosses bases de données. Consommateur, marché et autres. Parce qu'on est mondial. Et je pense qu'il y a 20 ans, c'était un peu en silo. Chacun avait un peu ses données dans des pays. Et on ne communiquait pas. Aujourd'hui, on essaie de centraliser les choses. Et puis, d'un point de vue consommateur, on essaie de développer de plus en plus des services tech. Des apps d'aide au conseil. Je pense, par exemple... Ou de diagnostic. Je pense, par exemple, à nos diagnostics de peau. Comme avec une app qui vous verrez peut-être. Spot scan de la roche posée. Skin expert de l'encombre. Pour faire des diagnostics de peau. Et aider le consommateur à aller chercher le produit qui le satisfait. Et qui lui convient. Donc je dirais, le groupe pivote de plus en plus vers cette beauty tech. Alors, on a contacté un confrère marketeer. Qui est associé dans une agence marketing Pureplayer. Tu le connais. Vous avez travaillé ensemble chez L'Oréal jusqu'en 2015. Il s'appelle Frédéric Van Damme. Et il a une question à te poser. On l'écoute. Je suis Frédéric, CEO de l'agence Social Sky. Spécialisé en social media et ex-L'Oréal. Depuis que je suis passé de l'autre côté, du côté agence. Ce qui m'anime au jour le jour, c'est d'apporter une vision pragmatique du marketing aux marques que nous accompagnons. Et s'il y a bien un challenge qui revient toujours en marketing. C'est l'arbitrage permanent entre le long et le court terme. Savoir jongler entre construire une marque forte sur la durée. Et générer des ventes immédiates. Alors avant, on avait tendance à vouloir tout faire. On construisait des plans marketing 360. Mélangeant above, below. On ne prenait pas trop de risques. Mais le monde idéal n'existe pas. Et le digital, le social media aussi en particulier, a rebattu les cartes. Diminuant les barrières à l'entrée. On a accès à des audiences beaucoup plus larges. Et donc, ce qui anime surtout les marketeurs aujourd'hui, c'est de prendre les bons paris. Les paris gagnants. Alors ma question pour toi, c'est si tu devais lancer une marque aujourd'hui. Mais avec des moyens limités. Vraiment en mode entrepreneur PME. Quels seraient selon toi les leviers marketing, médias, stratégiques à privilégier, à actionner ? Quel arbitrage ferais-tu entre le long terme et le court terme ? Et peut-être plus globalement aussi. Comment une marque qui grandit peut garder aussi cet état d'esprit de challenger ? Déjà, je salue Frédéric. Un homme talentueux qui travaille chez nous. Il y a beaucoup de talent d'ailleurs sur le marché belge. Je passe un petit moment pub. On est heureux de les accueillir dans notre organisation Benelux. Je crois qu'il met le doigt sur quelque chose d'important. Il dit prat stratégique. C'est comment manier le retour sur investissement à court terme. Et je dirais le retour sur la marque à long terme. Une tension qui nous anime quasiment au quotidien. Parce qu'en effet, c'est une histoire d'arbitrage et de validation de plein marketing. Avec un œil court terme. Parce qu'il faut quand même rentrer des ventes. Et pas trop tard non plus. Il y a quand même des objectifs, des targets. En collaboration avec nos amis du commerce. Et puis parfois, on leur dit non, non, non. Il faut aussi mettre un peu des moyens sur des choses un peu de marque à long terme. D'image de marque, de valeur, de mission de marque à plus long terme. C'est facile à dire quand on est dans un grand groupe. En effet, beaucoup d'investissements, beaucoup de grandes marques déjà établies. C'est plus compliqué, je pense. C'était le point de sa question. Si demain, je commence. Je dirais que, un, et j'adorerais éventuellement lancer une marque. Il faut être hyper clair sur l'histoire qu'on veut raconter. Ça commence quand même par cette vision à long terme. Quelle est la grande histoire que je veux raconter à mes consommateurs ? Quels sont les médias où quand même j'ai un peu de temps pour le raconter ? Les réseaux sociaux, le social media, c'est hyper important. Mais les gens suivent trois secondes ce qu'on a à leur dire. Donc c'est important. en contact, reach, fréquentie, mais quels sont un peu les médias où j'ai au moins 10, 15 secondes pour raconter mon histoire. Justement, j'y reviens, la partie influence marketing, communauté, quelles sont les communautés qui ont les mêmes valeurs que la marque que j'essaie de construire et que je vais aller rencontrer. Au début, je ne vais pas forcément avoir un retour, un effet, mais à long terme, je vais les fidéliser et eux-mêmes vont être les amplificateurs des histoires de ma marque. Donc, il faut aussi des investissements avec cette influence marketing qui n'est pas forcément juste acheter maintenant, demain, rendez-vous en magasin, il faut aussi aller chercher des valeurs. Évidemment, garder un pilier d'animation avec notre retail, très vite aller vers un trafic qualifié, e-commerce ou physique. Donc, je dirais à la fin, essayer d'avoir les pourcentages vont dépendre de la marque, du temps qu'on a, du temps long, du temps court, mais tout le monde le sait, entre le court terme, draver vers du trafic, de la vente, de la promo, il n'y a pas de honte de faire de la pub sur la promo, c'est hyper important et des choses un peu plus long terme qui parlent au cœur, donc le rationnel et l'émotionnel. Pour cette dernière partie de podcast, on cherche à comprendre d'où tu tires ton inspiration marque. Est-ce que tu as un coup de cœur en fait ? Donc oui, je regarde aussi les autres marchés, les autres marques. Comme tout le monde, j'ai à la fois ma casquette de citoyen et de marketeur lorsque je reçois des campagnes. Il y a une campagne qui m'a pas mal inspiré ces derniers temps, d'un opérateur internet au lendemain qui s'appelle KPN. Qu'on a connu en Belgique, mais qui est sorti, qui a fusionné, qui a changé de marque, etc. C'est un marché ultra compétitif, les télécoms, je n'y connais rien, mais j'ai été sensible au fait que pour se démarquer, certains vont parler d'offre-prix, que c'est important, de technique, de qualité du service opérateur, de connexion internet, de vitesse d'internet. Et eux ont pris un peu un contre-pied, ils se sont démarqués en faisant une campagne sur la sécurité sur internet. Ils se sont rendus compte qu'un hollandais sur deux était assez inquiet de la sécurité sur internet. Qu'est-ce que veut dire aujourd'hui un better internet, safe internet, je dirais, en anglais. Et ils ont fait une campagne sur le harcèlement numérique, avec vraiment une campagne 360. La vidéo qui m'a marqué, c'est une vidéo où on voit deux adolescents qui partagent des photos intimes et à un moment donné, le garçon transfère ses photos à ses amis. Et évidemment, ça part assez mal et ça détruit la jeune fille et l'histoire finit mal. Et au-delà de ça, cette vidéo m'a interpellé, j'ai une fille de 14 ans, je me sens assez concerné. Mais au-delà de ça, je pense que l'entreprise a été assez courageuse d'aller sur ce terrain-là. Deuxièmement, ils ont eu un vrai impact aux Pays-Bas, ils ont déclenché une conversation, même au niveau des pouvoirs publics, sur ce sujet, et qui a accéléré des formes de législation, aussi de programmes de pédagogie à l'école, dans les collèges et les lycées. Et vraiment, c'est une campagne qui m'a marqué, c'était l'année dernière. Ils ont d'ailleurs gagné un prix à Cannes, à Lyon, à ce sujet, sur les causes de marques, et ça m'a vraiment inspiré. Ton exemple est assez intéressant, mais comment est-ce qu'on fait pour suivre un peu ? Parce qu'il n'y a aucune assurance là-dessus, quand on fait ce type de marketing, qu'il y a une influence sur la société, donc le truc peut partir très très vite, donc on doit anticiper, on doit préparer ça en tant que marketer, que communicant, ou comment ça se passe ? Là où tu as raison, c'est que ça peut tomber du mauvais côté de la tartine, si on n'est pas assez légitime, si c'est fait un peu avec des gros sabots, des grosses ficelles. En amont, je crois que c'est vraiment les coups de consommateurs. Il faut rentrer et comprendre quelle est notre légitimité, et comment on y amène quelque chose. Vraiment, on veut apporter quelque chose avec sincérité et authenticité, c'est reconnu. Le temps file, Marc. Pour conclure ce podcast, j'ai l'habitude de demander à mes invités de formuler une règle d'or du marketing, qui fera partie à la fin de ce qu'on pourra appeler la liste des dix commandements de nos invités. Est-ce que tu as une idée particulière, sans être redondant avec nos invités précédents ? Non, mais je vais me permettre aussi de reciter une phrase de François Dalle, de Chez L'Oréal, qui disait toujours, il faut saisir ce qui commence. Elle est assez large, et du coup, elle laissera pas mal d'interprétations et de créativité pour nos marketeurs. Saisir ce qui commence, ça veut dire être curieux, pour comprendre ce qui commence, mais ça veut dire aussi saisir la balle au bond. Donc, il y a l'effort, je crois qu'on en a un peu parlé pendant cette émission. Voilà, un appel à la curiosité, mais aussi à la prise de balle au rebond. Merci, Marc Duquesnoy, pour ta présence dans notre studio. Merci d'avoir pris aussi du temps sur ton jour de congé, on doit le dire. Et j'espère que vous aussi, qui nous écoutez, vous avez apprécié ce nouvel épisode. Je vous donne rendez-vous le mois prochain pour un nouvel épisode de CMO Voices, produit par l'UBA, l'association belge, par et pour les marques, et par Trust Media, le média sales house de l'Eco et du Tate. A bientôt. Vous venez d'écouter CMO Voices, un podcast produit par UBA Belgique et Trust Media. Découvrez d'autres récits de marketing via l'eco.be slash CMO Voices.
Key Points:
CMO Voices is a marketing podcast featuring recognized Chief Marketing Officers.
The guest, Marc Duquenois, from L'Oréal Group, is highlighted for his marketing expertise.
Discussion on the evolution of the beauty market and strategies to maintain market share.
Insights shared on marketing challenges, innovation, brand portfolio management, and handling setbacks.
Importance of balancing creativity and strategy in marketing.
Emphasis on leveraging influencers and digital tools in marketing strategies.
Summary:
CMO Voices is a podcast showcasing prominent Chief Marketing Officers, with a recent episode featuring Marc Duquenois from L'Oréal Group. The discussion touched upon the evolution of the beauty market, emphasizing the importance of innovation and brand portfolio management to sustain growth. Insights were shared on tackling marketing challenges, balancing creativity with strategy, and leveraging influencers in digital marketing. Marc also reflected on a past marketing setback and emphasized the value of strategic decision-making during tough times. Furthermore, the digital transformation in marketing, including the use of data and tech, was highlighted as a key change from the past. Overall, the episode provided valuable insights into the dynamic world of marketing and the strategies employed by industry leaders to stay competitive.
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